RESPECTEZ LE DROIT Á LA DÉCONNEXION DE VOS COLLABORATEURS !

7 mins de lecture | Anne Pétillo | Article | Bien-être

femme avec la tête baissé sur son ordinateur

Le rôle clé de l’employeur pour limiter la surconnexion des salariés

De plus en plus de salariés n’arrivent plus à déconnecter après leur journée de travail, mais aussi pendant leurs vacances. En effet 89% de femmes et 85% d’hommes trouvent que le travail est bien plus présent qu’avant durant leurs congés.

Responsabilités croissantes, peur de perdre son travail, pression des chiffres…nombreuses sont les raisons pour lesquelles les salariés sont tentés de répondre aux mails, appels et sms tardifs… même pendant leurs vacances.

Les chiffres cités plus haut ne sont guère surprenants quand on sait que seulement 16% des entreprises ont créé des règles de déconnexion pour leur personnel. Pourtant, d’après le Code du Travail, c’est à l’employeur de garantir un droit à la déconnexion afin de protéger la santé mentale et physique de ses collaborateurs.

 

1. Qu’est-ce que le droit à la déconnexion ?

Le droit à la déconnexion est un principe selon lequel un salarié est en droit de ne pas être connecté aux outils numériques professionnels hors des horaires de travail. La France est le premier pays à avoir intégré ce droit dans le droit du travail (pour les structures de plus de 50 salariés). Sont concernés tous les salariés, spécifiquement les cadres, les salariés itinérants ou non sédentaires, ainsi que les salariés en télétravail compte tenu de leur statut et conditions de travail.

Consacré par la loi Travail du 8 juin 2016 et l’ordonnance Macron du 22 septembre 2017, il sert à :

  • Garantir l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée et familiale
  • Réguler le stress et la charge mentale
  • Instaurer une culture de bien-être au travail
  • Garantir les temps de repos
  • Réduire les risques de burn-out

 

2. Comment mieux faire appliquer ce droit ?

a) La déconnexion pour gagner en performance et en qualité de vie au travail

Avec la digitalisation des outils de travail, et en particulier l’amélioration de leur accessibilité, les salariés sont de plus en plus « connectés » en dehors des horaires classiques de bureau, gommant peu à peu la frontière entre la vie professionnelle et personnelle. Selon une étude réalisée par Éléas sur l’impact du numérique pour les salariés, 47% d’entre eux se connectent à leurs outils de travail le soir après le travail, 45% le week-end et 35% pendant les congés.

Pourtant, la déconnexion est essentielle pour que les collaborateurs soient véritablement performants sur leur temps de travail. Selon Ivan Illich (Loi d’Illich), « au-delà d’un certain seuil, l’efficacité humaine décroît, voire devient négative ». En somme, moins les salariés se déconnectent (ou prennent de pauses) et moins ils seront productifs.

Tout comme le surinvestissement ou le surprésentéisme au travail, la surconnexion provoque des effets négatifs pour la santé des collaborateurs : stress important, migraines, troubles du sommeil, accoutumance, fatigue, etc. Des maux physiques qui, à long terme, entraînent des difficultés de concentration et une baisse d’efficacité chez les salariés.

Le droit à la déconnexion vise alors à encadrer les pratiques des salariés pour limiter les effets néfastes des usages du numérique au travail et pour conserver un bon équilibre entre leur vie privée et professionnelle.

 

b) Le rôle clé de l’employeur pour limiter la surconnexion des salariés

L’employeur a la responsabilité de s’assurer que le droit des travailleurs à bénéficier d’un temps de repos suffisant soit respecté au sein de son entreprise. Et le droit à la déconnexion s’intègre parfaitement dans cette optique.

La loi n’encadre pas les modalités d’exercice ni la mise en œuvre du droit à la déconnexion. Les mesures sont diverses et propres à chaque entreprise. Chacune devant trouver le dispositif le mieux adapté à sa situation.

Cela sonne comme une évidence, mais la mise en place de mesures va de pair avec la notion d’exemplarité pour avoir un véritable impact. L’employeur peut mettre en place toutes les actions nécessaires, si la direction et le top management ne les respectent pas, leur bonne application ne fonctionnera pas (exemple classique : le mail envoyé à 20h qui incite le destinataire à répondre hors des heures de travail).

 

c) Sensibiliser les salariés sur les risques de l’hyperconnectivité

Une première étape à la portée de tous concerne la réalisation de campagnes de sensibilisation pour l’ensemble des salariés en vue de les informer sur les risques et les enjeux liés à l’utilisation des outils numériques.

Certaines entreprises proposent également des formations sur les bonnes pratiques à adopter pour limiter les risques d’un usage excessif, adressées principalement aux managers. D’abord pour qu’ils puissent les partager au sein de leurs propres équipes, mais aussi pour les adopter dans leur façon de travailler au quotidien (n’oublions pas qu’ils sont les premiers concernés par l’hyperconnexion).

La prévention des risques sera d’autant plus pertinente si vous identifiez en amont les problématiques propres à votre entreprise en sondant vos collaborateurs sur leurs usages des outils professionnels pendant et hors du temps de travail.

 

d) Miser sur des actions concrètes pour encourager la déconnexion

Une enquête réalisée par Welcome to the Jungle (2021) souligne que pour 67% des salariés, les difficultés de déconnexion émanent de leur propre comportement. Les habitudes de travail, la pression ou encore la norme sociale freinent la déconnexion “naturelle”. Si bien qu’il est parfois nécessaire de s’appuyer sur des mesures, plus ou moins coercitives, pour inciter à la déconnexion.

Des outils, comme Slack, permettent de paramétrer des plages horaires de disponibilité et de déconnexion, sans oublier les solutions de suivi des temps, comme Timmi Temps, qui offrent également la possibilité de paramétrer les temps de repos obligatoires quotidiens et hebdomadaires selon la politique de l’entreprise.

 

e) S’appuyer sur une charte de déconnexion pour encadrer les pratiques

Si la création d’une charte n’a rien de novateur, elle permet tout de même de regrouper et de formaliser dans un document unique toutes les informations et bonnes pratiques à adopter. Qu’elle soit obligatoire ou non*, la charte souligne la volonté de l’entreprise de faire bon usage des outils informatiques dans le respect des temps de repos et de l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle.

Afin d’impliquer au maximum les collaborateurs dans cette démarche, la création de la charte peut faire l’objet d’ateliers avec quelques volontaires pour définir son contenu de manière collaborative. Nous préconisons également d’inclure le CSE dans la rédaction.

Pour que les salariés prennent réellement connaissance de ce document et se l’approprient, nous recommandons de prévoir une présentation de vive voix (réunion ou webinaire) à l’issue de laquelle les salariés pourront poser toutes leurs questions, et de partager la charte à chaque onboarding.

 

 À propos de l'auteur

ANNE PETILLO - DIRECTEUR DES RESSOURCES HUMAINES • DRH JURIDIQUE SOCIAL

Titulaire d’un DEA en Droit social et du CAPA (Certificat d’Aptitude à la Profession d’Avocat), Anne a d’abord conseillé Hays en tant qu’Avocat entre 2011 et 2015. En 2015, elle rejoint la société et occupe un poste de Juriste en Droit social. En 2016, elle devient Responsable juridique Social et participe à la gestion du personnel intérimaire et permanent. En 2019, elle devient DRH adjoint du groupe Hays France & Luxembourg.

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