TDAH, HPI, HPE : faut-il parler de sa neurodivergence en entretien d’embauche ?
5 mins de lecture | Marie Maillard & Isabelle Pelletant | Article | Entretien d'embauche

Neuroatypisme : comment parler de sa singularité en entretien ?
Depuis quelques années, les profils neuroatypiques (TDAH, HPI, HPE) occupent une place de plus en plus visible dans la société et commencent à susciter l’intérêt du monde professionnel.
Longtemps méconnus ou mal compris, ces profils sortent progressivement de l’ombre, portés par une meilleure sensibilisation du public et une volonté croissante d’inclusion en entreprise.
Pourtant, lorsqu’il s’agit d’un entretien d’embauche, la question reste délicate : faut-il parler ouvertement de sa neurodivergence ? Est-ce un atout, un risque, ou simplement une information personnelle à garder pour soi ?
Neuroatypiques : qui sont-ils ?
Le terme « neuroatypique » inclut une diversité de profils cognitifs, souvent invisibles, mais qui influencent profondément la manière de penser, de ressentir et d’interagir avec le monde. Parmi les profils les plus fréquemment évoqués, on retrouve le TDAH (trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité), le HPI (haut potentiel intellectuel) ou zèbre et le HPE (haut potentiel émotionnel).
Ces profils partagent des caractéristiques comme :
- Une pensée en arborescence : les idées se développent de manière non-linéaire, souvent en cascade, ce qui peut favoriser la créativité, mais rendre difficile la concentration sur une seule tâche.
- Une forte créativité : capacité à faire des liens inattendus, à imaginer des solutions originales, à sortir des cadres établis.
- Une intensité émotionnelle : les émotions sont vécues de manière amplifiée, ce qui peut être une force dans les relations humaines, mais aussi une source de vulnérabilité.
- Des besoins cognitifs spécifiques : besoin de stimulation intellectuelle, d’autonomie, de sens dans les missions confiées, ou encore d’un environnement de travail adapté (calme, structuré, flexible).
Ces profils peuvent également rencontrer des difficultés, notamment avec des environnements de travail rigides, des tâches répétitives, ou des contextes où les règles prennent le pas sur l’autonomie.
Pourquoi choisir de parler de son neuroatypisme en entretien ?
Parler de sa neurodivergence lors d’un entretien d’embauche peut tout d’abord être un choix de transparence et d’honnêteté. En effet, certaines personnes ressentent le besoin de poser les bases d’une relation professionnelle honnête et de s’assurer que l’environnement de travail sera adapté à ses besoins spécifiques.
H3 Quels avantages ?
- Mieux se présenter en expliquant son mode de fonctionnement afin d’éviter des malentendus futurs et faciliter la communication pendant l’entretien.
- Valoriser ses points forts et ses forces : pensée créative, capacité d’analyse, sensibilité relationnelle… ces traits inhérents aux personnes neuroatypiques peuvent être perçues comme de réels atouts différenciant. Cela permettra également en parallèle d’évoquer d’éventuelles difficultés (sensibilité au bruit, besoin de flexibilité et d’autonomie).
- Mesurer la culture d’entreprise : la réaction du recruteur ou de votre potentiel manager peut être représentatif de l’ouverture d’esprit, la bienveillance et la capacité d’adaptation de l’entreprise et/ou du type de management en place dans le service auquel vous postulez.
- Anticiper l’aménagement de poste : horaires flexibles, environnement calme, consignes claires. Ces ajustements peuvent faire toute la différence dans l’expérience professionnelle d’un profil neurodivergent.
Parler de sa neurodivergence peut aussi permettre d’établir dès le départ une relation de confiance avec l’employeur, en montrant que l’on se connaît bien, que l’on est capable d’identifier ses besoins et que l’on adopte une posture proactive. Cela peut démontrer une certaine maturité professionnelle et une bonne capacité d’adaptation.
Pour certains profils, le fait de poser ce cadre permet également de réduire le stress lié à la dissimulation, et d’éviter l’épuisement ou le fait de tenter de se conformer à des attentes qui ne correspondent pas à son mode de fonctionnement.
Pourquoi choisir de ne pas parler de son neuro-atypisme en entretien ?
A l’inverse, certaines personnes neuroatypiques choisissent de ne pas aborder le sujet en entretien d’embauche. Un choix motivé notamment par la crainte d’être stigmatisé, voire discriminé.
Une étude d’Understood.org indique d’ailleurs que 50 % des employés neuroatypiques ne parlent pas de leur neurodivergence au travail, et au moins un salarié sur quatre a été confronté à de la discrimination ou à des préjugés sur leur lieu de travail en raison de leur neurodivergence.
Existe-t-il des risques à en parler ?
Le principal risque de parler de sa neurodivergence en entretien est celui d’être jugé ou mal compris. Si le recruteur n’est pas sensibilisé à ces sujets, il peut interpréter ces particularités comme des faiblesses ou des signaux d’alerte, plutôt que comme des différences enrichissantes. Parler de sa neurodivergence peut notamment engendrer les craintes suivantes :
- Des préjugés. Certains recruteurs pourraient avoir une vision biaisée ou réductrice des profils neuroatypiques, les associant à un manque de fiabilité, de stabilité ou encore de sociabilité.
- Une discrimination indirecte. Même sans intentions malveillantes, des biais cognitifs pourraient inconsciemment pousser un recruteur à écarter un profil perçu comme « atypique ».
- Une stigmatisation. Révéler une neurodivergence peut parfois enfermer la personne dans une case, au détriment de la richesse de son parcours, de ses soft skills et de ses compétences techniques.
Cependant, ne pas parler de sa neurodivergence ne signifie pas être malhonnête : chacun est libre de choisir ce qu’il souhaite partager ou non. Il est tout à fait possible de rester soi-même, tout en mettant en avant ses compétences et en exprimant ses besoins professionnels de manière neutre et constructive.
Comment parler de votre neurodivergence (si vous décidez de le faire) ?
Si vous choisissez de parler de votre neurodivergence en entretien, il est essentiel de le faire avec justesse et stratégie. L’objectif n’est pas de vous justifier, ni de vous excuser, mais de présenter cette spécificité comme une clé de compréhension de votre fonctionnement, et non comme un frein à vos performances.
Voici quelques conseils pour aborder le sujet avec assurance :
Choisir le bon moment
Il n’est pas nécessaire d’aborder votre neurodivergence dès les premières minutes de l’entretien. Attendez que le lien soit établi et que le recruteur vous invite à parler de votre manière de travailler, de vos besoins ou de votre environnement idéal. Cela vous permettra d’inscrire votre partage dans une dynamique constructive.
Utilisez un langage positif et professionnel
Formulez les choses de manière factuelle, orientée vers les solutions. Plutôt que de parler de « difficultés à rester concentré », évoquez par exemple une « pensée très dynamique, qui nécessite un cadre structuré pour exprimer tout son potentiel ». Remplacez les termes techniques par des formulations accessibles : par exemple, "je suis neuroatypique" ou "j’ai un fonctionnement cognitif un peu différent" peut suffire.
Ancrez votre propos dans votre expérience
Illustrez vos propos par des exemples concrets. Expliquez comment votre mode de fonctionnement vous a permis de réussir une mission, résoudre un problème de manière originale, ou créer un lien fort avec une équipe. Cela aide à dépasser les idées reçues et à mettre en lumière la valeur ajoutée de votre singularité.
Faites le lien avec le poste
Montrez que vous avez réfléchi à l’adéquation entre vos besoins et les réalités du poste. Par exemple : « Je sais que je suis plus efficace dans un environnement calme et structuré, ce qui correspond, il me semble, à l’organisation de votre entreprise ». Cela prouve non seulement que vous vous connaissez bien, mais aussi que vous êtes engagé dans une démarche d’intégration positive.
Neurodivergence en entretien : un choix personnel
Parler ou non de sa neurodivergence en entretien d’embauche reste un choix profondément personnel, qu’il convient de faire en pleine conscience, en fonction de son propre confort, du contexte, et de ce que l’on perçoit de l’environnement professionnel.
Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise décision, mais une nécessité : celle de mieux se connaître, de savoir ce qui permet de travailler dans les meilleures conditions, et d’assumer son parcours, quel qu’il soit.
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À propos de l'auteur
Isabelle Pelletant – Directrice Région Sud-Centre
Diplômée d’une Grande École de Commerce, Isabelle présente une expertise de 20 ans dans le monde du conseil.
Elle débute son parcours par quatre ans dans le conseil en organisation de grands groupes. Elle y réalise des missions d’audits organisationnels et opérationnels, accompagnant ainsi des Directeurs de services et Directeurs Généraux dans l’optimisation de leurs process.
Arrivée chez Hays en 2007 comme consultante, elle crée le bureau Hays de Montpellier en 2009 dont elle prend le management. En parallèle, elle intervient sur l’ensemble du sud de la France sur des missions de conseil en ressources humaines. En 2019, elle devient Directrice Régionale Occitanie-Auvergne, chapeautant les bureaux de Toulouse, Montpellier et Clermont-Ferrand.
Depuis janvier 2024, Isabelle intègre dans son périmètre les bureaux de Nice et Aix-en-Provence, chapeautant désormais les régions PACA et Occitanie.
Depuis 18 ans chez Hays, elle accompagne des entreprises de toute taille et de tout secteur (public, privé, parapublic) sur leurs problématiques de recrutement, d’organisation ou d’études RH.